mercredi 21 mai 2008

Françoise Dolto, le médecin qui parlait aux bébés, aurait 100 ans

A une époque où les filles convenables ne faisaient pas d'études, la petite Françoise voulait être "médecin d'éducation". Devenue pédiatre et psychanalyste, Françoise Dolto n'aura de cesse de donner corps à ce rêve d'enfant, y gagnant une notoriété toujours vivace.

Françoise Dolto "a apporté une autre approche de l'éducation des enfants", indique la psychologue de la petite enfance Sylviane Giampino, à l'occasion du centième anniversaire de sa naissance, le 6 novembre 1908. "Elle avait une espèce de sagesse philosophique qui permettait de dire haut et fort des choses que des gens malheureusement n'entendent pas aujourd'hui", ajoute Pierre Delion, chef de service de pédopsychiatrie au CHU de Lille, pour qui son enseignement conserve "une acuité formidable" face aux problèmes actuels.
"Dolto a placé la parole au centre de tout, rappelle Mme Giampino. Elle disait que l'enfant est dès sa conception un sujet humain de relation et de langage, mais qu'il doit recevoir une parole et des soins qui l'humanisent". A une époque -l'immédiat après-guerre- où le nourrisson était apparenté à un tube digestif, Françoise Dolto osait parler au foetus dans le ventre de sa mère.Sans savoir exactement comment, elle était persuadée que le bébé pouvait comprendre. "J'étais un peu zinzin", confessera-t-elle.

"Il y a des affirmations issues de l'observation clinique de Dolto qui semblaient de l'ordre de la pensée magique à l'époque, qui ont été démontrées par la recherche", indique Mme Giampino. Françoise Dolto "a eu envie de dire comment ça se passe quand quelque chose ne va pas. De façon à ce que les parents, les éducateurs, les soignants puissent faire au mieux pour que ça se passe bien pour les enfants"."C'est pour ça qu'elle a écrit +La cause des enfants+, qu'elle a créé la Maison Verte, c'est aussi pour ça probablement qu'elle s'est engagée dans un discours public". "Françoise Dolto à la radio, c'était une sorte de confiance en l'éducation populaire", estime la psychanalyste.

Avec le risque d'être mal comprise. A ses détracteurs qui lui reprochent aujourd'hui d'avoir fabriqué "des enfants rois", la psychologue répond que "si on lit +L'Image inconsciente du corps+, on comprend que c'est l'inverse". "C'est le livre dont on parle le moins et c'est vraiment là qu'elle a fait un apport théorique".
Au centre de sa théorie, la "castration symboligène" : elle va permettre à l'enfant en développement, qui découvre les potentialités de son corps, d'intérioriser un certain nombre de "règles du jeu" de la vie en société. "Les adultes sont là pour lui imposer des limites, simplement ça doit lui être expliqué, mis en mots", explique Mme Giampino.
"Dolto était tout sauf permissive. C'est un malentendu".Pour la psychologue, deux choses peuvent expliquer les reproches qui lui sont faits : d'une part "elle avançait sur un terrain de mentalités qui n'était pas encore prêt"; d'autre part certains saisissent l'occasion de son centenaire "pour ressortir la hache de guerre contre la psychanalyse".
"On peut dire que depuis Françoise Dolto et quelques autres, on s'occupe autrement des enfants dans la vie quotidienne", conclut Sylviane Giampino."Mais ce n'est pas parce que c'est son centenaire qu'il faut lui attribuer tous les apports de la psychologie du nourrisson et de l'évolution des pratiques professionnelles par rapport aux enfants", tempère-t-elle, citant Jenny Aubry, amie de Françoise Dolto, Juliette Favez-Boutonnier ou encore Geneviève Appell.

PARIS (AFP) -

Aucun commentaire: