jeudi 22 mai 2008

"Mon but n’est pas de donner des recettes ...

"Mon but n’est pas de donner des recettes – chaque enfant, chaque relation parents-enfants étant différente – mais d’arriver à ce que les parents comprennent qu’ils ont les moyens de résoudre eux-mêmes les difficultés.

A notre époque, les gens ont pris l’habitude de demander à d’autres de résoudre leurs problèmes à leur place.

Or, si chacun se mettait à réfléchir calmement, honnêtement,(...), en sachant qu’il sera entendu – c’est ça l’essentiel, savoir que quelqu’un vous écoute -, alors il s’écouterait avec une partie de lui-même qui serait beaucoup plus lucide que celle prise dans le maelström de l’angoisse, de l’inquiétude, du problème aigu."


Françoise DOLTO

mercredi 21 mai 2008

L'enfant tornade

Des nuages noirs s’annoncent sur l’avenir du petit Jehan. Les parents ont été appelés à l’école. Rien ne va plus! Leur enfant serait atteint de TDAH…

«Nous sommes inquiets, mon mari et moi, pour l’avenir scolaire de Jehan. On nous parle déjà de penser éventuellement à un enseignement spécial si la situation ne s’améliore pas. L’institutrice se plaint de son incapacité à se concentrer, il bouge sans cesse, il dérange la classe, il donne l’impression de n’avoir aucun intérêt pour les tâches scolaires. Tout le monde s’accorde pour dire qu’il ne manque certainement pas d’intelligence mais son comportement dérange trop. A la maison, c’est aussi un enfant agité. Il reste difficilement en place et une concentration prolongée n’est pas toujours son fort! L’institutrice veut bien encore faire l’effort de le garder jusqu’à la fin de l’année, mais à la condition qu’il se fasse prescrire de la Rilatine par notre médecin de famille. Il paraît que ce médicament améliore les facultés de concentration. Est-ce une bonne chose de le mettre sous médicament? L’hyperkinésie serait-elle une maladie?»

Voilà des parents bien déstabilisés! Ce petit, dès son plus jeune âge, se montrait si prometteur concernant l’apprentissage… Il a marché tôt, il a parlé tôt, tout baignait…

TDAH, mystérieuses initiales

TDAH signifie: trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité. L’hyperactivité motrice fait état d’enfants en perpétuel mouvement, incapables de mettre en place une action globale organisée, constructive et coordonnée.

L’enfant hyperkinétique serait donc un enfant qui n’arrive pas à contrôler ses mouvements. C’est plus fort que lui: dès qu’il est à un endroit, quelque chose le pousse à se mettre ailleurs. Incapable de rester en place, il a sans cesse besoin de bouger et ne peut s’adonner longtemps à une activité. C’est très fatigant et énervant pour l’entourage de vivre avec pareille tornade! Et ce n’est guère agréable pour l’enfant de ne trouver à aucun moment un lieu où se détendre, se poser et se reposer…

Le diagnostic «hyperkinétique» est très à la mode actuellement et malheureusement trop souvent donné à mauvais escient à des enfants turbulents, agités, mal cadrés ou développant une certaine angoisse. Si vous observez que votre enfant est capable de se concentrer quand une tâche ou un jeu lui plaît, vous pouvez déjà vous dire que la raison de sa bougeotte est à chercher ailleurs que dans un syndrome de TDAH!

Seule une observation fine et adéquate permet de différencier la présence d’un authentique trouble de l’attention d’un simple tempérament excessif, d’une attitude d’opposition avec provocation ou encore d’un signe d’angoisse ou de dépression.

Un enfant turbulent

Nombreux sont les enfants qui, présentant une symptomatologie hyperkinétique, réagissent à un facteur de stress présent à l’école ou dans la famille. Ou encore sont des enfants actifs au comportement normal mais mal toléré par l’environnement.

Les enfants ont-ils encore le droit d’être des enfants turbulents et casse-cou? Au lieu d’être lovés devant la télé ou accrochés à leur ordinateur, ont-ils des moments de détente physique? Ont-ils l’occasion de se défouler, de courir, de crier, de se rouler à terre ou d’escalader un arbre? Dans certaines écoles, pour éviter la violence lors des récréations, on propose aux enfants de regarder des films vidéo… Chemin faisant, la société favorise et valorise de plus en plus l’homme assis au détriment de l’homme debout! Il n’empêche qu’il y a une catégorie d’enfants actifs qui ont besoin de déployer une grande énergie; ils ont besoin de mouvement, de place, d’air frais et… d’un cadrage clair. Ayant du mal à rester assis toute une journée, de nos jours ces enfants n’ont pas bonne presse! Déjà stressés par une série d’autres facteurs, les adultes ont du mal à assumer ces enfants turbulents. Ces derniers en appellent à une éducation rigoureuse, cohérente et structurante, demandent à être confrontés à des limites claires et à des prises de positions nettes de la part des adultes. Tout cela dans un contexte stimulant leur autonomie et leur responsabilisation. C’est à ce prix qu’ils établissent des repères et trouvent en toute quiétude leur place dans la société. Dans le cas contraire, leur désarroi se manifeste souvent par un comportement impulsif et agité.

Ne pas trouver sa place? Pourquoi?

Nombreux aussi sont les enfants anxieux, trouvant mal leur place dans la famille ou dans leur peau, qui se voient coller l’étiquette d’hyperkinésique.

Alors, cet enfant constamment agité, qu’essaie-t-il de nous dire? De nous communiquer? S’il ne reste pas longtemps au même endroit, souvent… c’est qu’il cherche sa place. S’il se déplace sans cesse, c’est qu’il ne trouve pas sa place… Il se cherche, il cherche, sans relâche, avec une détermination inconsciente, infatigable, sa place? Ce lieu d’où il se sentirait reconnu, valable, utile, humanisé.

Il y a mille et une raison qui peuvent induire chez un enfant le sentiment «de ne pas avoir sa place». Quelque chose les agite à l’intérieur de leur psyché et le corps en est le porte-parole. Ils peuvent imaginer de ne pas être du bon sexe, de ne pas être arrivé au bon moment dans la vie des parents, de ne pas répondre à leur attente, d’être transparent à leurs yeux, etc.

Un enfant peut aussi être envahi par une question. La recherche de la réponse, déterminante pour la vision qu’il construit de lui-même, l’empêche de prêter attention à toute autre chose. La diversité de ces questions est illimitée: «Aurait-il mieux fait de ne pas naître? Est-il responsable du divorce de ses parents? Doit-il se sentir coupable de la fausse couche que sa mère a faite lorsqu’il avait deux ans?» Que sais-je encore!

Quid de la Rilatine?

Face à ces enfants qui dérangent la classe, certains enseignants demandent aux parents de faire prescrire à l’enfant de la Rilatine pour les rendre plus calmes. Savent-ils qu’il s’agit d’un médicament figurant sur la liste des stupéfiants? Ce psychostimulant agissant sur le cycle de la dopamine, à l’origine conçu contre les troubles de l’obésité, aurait chez les enfants un effet paradoxal.

Mais n’y a-t-il pas lieu de s’inquiéter que ce médicament, soudainement prôné comme une panacée, soit prescrit avec tant de facilité et de promptitude, alors qu’il s’agit d’une amphétamine qui est, comme on le sait, une drogue? Le rapport sur la Santé dans le monde insiste sur les points suivants: on ignore encore l’étiologie précise des troubles hyperkinétiques et, trop souvent, un diagnostic de trouble hyperkinétique est posé sans que les critères diagnostiques objectifs de cette affection ne soient réunis…

Avant de «doper» un enfant, n’y a-t-il pas intérêt à se questionner s’il n’y a pas d’autres mesures à mettre en place? Un soutien aux parents, une révision de certaines attentes irréalistes, une empathie concernant d’éventuels quiproquos dans la relation de l’enfant avec son entourage ou l’atténuation de certains conflits facilitent souvent les possibilités d’attention d’un enfant. En renforçant son estime de lui, souvent, peu à peu sa bougeotte diminue…

Ce texte a été publié par La Ligue des Familles de Belgique dans son édition Le Ligueur #22.

Enfant Turbulent, Débat avec Edwige Antier, pédiatre, auteure de "Dolto en héritage" (Robert Laffont, 2005), jeudi 22 septembre 2005

Doudou : Les enfants turbulents ont-ils toujours existé ou est-ce une spécificité de nos sociétés actuelles où règne la violence ?

Edwige Antier : Oui, les enfants turbulents ont toujours existé. Parce que les enfants ont toujours connu la violence, malheureusement. Mais il est vrai que dans notre monde d'aujourd'hui, ils sont harcelés par de multiples stimuli : télévision, téléphone, vie précoce en collectivité, qui aggravent considérablement leur agressivité.

COUCOU : Comment faire la différence entre un enfant turbulent et un enfant hyperactif ?

Edwige Antier : C'est très important. Parce que le terme d'hyperactif sonne comme une pathologie qui va mériter traitement ou rééducation. On l'emploie trop largement aujourd'hui. L'hyperactif associe trois symptômes : la difficulté à se concentrer, l'impulsivité et l'agitation. Seule l'association des trois peut faire suspecter le diagnostic d'hyperactivité. Un enfant qui est très actif, qui aime monter sur les toboggans, taper dans les ballons, courir dans les couloirs de la maison, mais qui est capable de se concentrer lorsque vous lui racontez une petite histoire avec un livre, n'est pas un enfant hyperactif. C'est un enfant vif, heureusement.

Tybert : Ne pensez-vous pas qu'un enfant turbulent est un enfant normal ?

Edwige Antier : Oui, ma réponse précédente montre que l'enfant turbulent, mais qui est capable de se concentrer sur un échange avec l'adulte et qui ne bouscule pas systématiquement ses congénères pour toujours passer le premier au toboggan (impulsivité), est normal. Il faut savoir respecter la turbulence de cet enfant mais aussi canaliser son énergie vers des échanges positifs. C'est un enfant avec lequel il faut volontiers se poser pour ouvrir des livres, faire de la pâte à modeler, partager une petite histoire douce à la télévision... Et sa turbulence passera avec la maturité, vers 5 ans.

CANALISER L'ÉNERGIE

Thierry : Ce qu'on appelle turbulence n'est-il pas plutôt de l'énergie non canalisée et mal distribuée plutôt qu'une forme de violence ?

Edwige Antier : Merci, Thierry, d'employer le mot que je viens justement d'écrire : canaliser. Car un enfant est une extraordinaire boule d'énergie. Et toute l'éducation consiste à canaliser son énergie vers le positif : j'apprends à construire une tour de cubes, à parler, à colorier "sans dépasser", par rapport à l'énergie négative : je me roule par terre, je mords, je tape. Et nous allons voir que c'est tout un art et beaucoup de présence.

Luciole : Pensez-vous que la tendance américaine à donner des calmants aux enfants jugés hyperactifs risque de gagner la France ?

Edwige Antier : Bonne question. En France, nous utilisons peu les "calmants" style Ritaline, et nous avons mis des barrières : la prescription initiale ne peut être faite que par un pédopsychiatre hospitalier qui seul peut la renouveler tous les ans, après des bilans approfondis. Même avec cette précaution, la prescription augmente mais reste très marginale. Il ne faut pas non plus ignorer certains vrais hyperactifs qui sont dans des états suicidaires tant ils sont rejetés par le groupe. On ne peut donc réfuter totalement l'intérêt du traitement médical.

Tybert : Vous dites que la vie précoce en collectivité aggrave l'agressivité... Quid, alors, des crèches ?

Edwige Antier : Il est important d'humaniser les crèches, c'est-à-dire que le personnel doit avoir une attention permanente au groupe pour réguler les relations entre les enfants. Et lorsque vous êtes une éducatrice pour huit enfants qui marchent (la norme), il vous faut une attention constante. Faute de laquelle, en effet, les enfants ont des jeux qu'on appelle "parallèles", ils ne savent pas échanger jusqu'à 3 ans, ils se poussent, voire se mordent. C'est dire l'importance de la formation du personnel, du respect qu'on lui doit et de l'ouverture de la crèche aux parents, pour laquelle je travaille avec d'excellents retours.

Sophie : Pensez-vous que les punitions (expliquées et justifiées) puissent aider à "recadrer" un enfant très turbulent ?

Edwige Antier : Certainement pas. Au contraire, soit elles aggravent la turbulence car elles endurcissent l'enfant, qui prend l'habitude de vous braver, soit elles l'éteignent et le transforment en un enfant trop soumis qui perd de sa curiosité. Jusqu'à l'âge de 7 ans, lorsque vous voulez appliquer la punition, l'enfant ne sait déjà plus pourquoi il a voulu transgresser. Il se culpabilise et entre dans le profil de l'"affreux jojo".

Laurence : Ma fille a 2 ans. Je la retrouve depuis sa naissance dans les qualificatifs d'impulsive et d'agitée. Elle ne reste pas en place avec un livre ou un jeu. Seul un DVD de dessin animé la fait tenir en place plus de cinq minutes. Faut-il utiliser ce support pour progresser, ou bien au contraire le réduire à la portion congrue ?

Edwige Antier : On a beaucoup diabolisé le petit écran, mais si vous vous asseyez à côté d'elle, que vous la prenez sur vos genoux en partageant le dessin animé, en faisant des commentaires et en captant bien ses émotions, il joue le rôle d'un livre d'images. Donc pourquoi s'en priver et l'en priver ? Par contre, mettre le DVD en boucle et la laisser sucer son doudou le regard vague pendant que vous vaquez à vos occupations, c'est vraiment habituer son cerveau à l'absence d'échange, et dès que vous éteindrez le magnétoscope, elle se remettra à grimper aux rideaux.

Momo : Un enfant naît-il turbulent ou le devient-il ?

Edwige Antier : C'est toute la question entre l'inné et l'acquis. Avec trente ans de pratique, je peux dire que dans 90 % des cas, il le devient, mais ça vient très tôt. Dès le deuxième semestre de la vie, la façon dont vous interagissez avec votre enfant va laisser partir son énergie de manière négative. Et on peut le deviner en voyant vos relations. Le deuxième enfant est beaucoup plus turbulent que le premier parce qu'on est moins en relation de duo avec le deuxième, par exemple. Le caractère inné s'impose parfois à l'analyse, mais c'est tout de même rare.

Le Monde

Sommeil de l’enfant : des besoins très différents

Peu importe que votre enfant soit un petit ou un gros dormeur, un couche-tôt ou un couche-tard. L’essentiel, c’est qu’il dispose de la quantité et de la qualité de sommeil dont il a besoin. Une condition indispensable pour un bon développement. Étape par étape, le sommeil grandit avec votre enfant…


Le sommeil est essentiel à tous. Mais chez l’enfant, en plus de la récupération de la fatigue physique et nerveuse, il sert à la mise en place des circuits nerveux et favorise de nombreuses fonctions mentales et psychiques comme la mémorisation et l’apprentissage. En outre, c’est au cours des tous premiers mois que l’enfant met en place la structure de son sommeil d’adulte.

A la naissance : un cycle de sommeil court

Sommeil de l’enfantLe sommeil de l’enfant se construit dès la période foetale. On observe déjà une alternance d’activité et d’immobilité même si le sommeil du foetus est indépendant de celui de la mère. A sa naissance, un bébé dort en moyenne 16 heures par jour. Son cycle de sommeil est court, de 50 à 60 minutes (pour 90 minutes environ chez l’adulte) et fait alterner des périodes de sommeil agité (l’équivalent du sommeil paradoxal) et des périodes de sommeil calme. Le nouveau-né n’a pas encore de rythme jour/nuit et son sommeil est morcelé en périodes de 3-4 heures.

De trois à six mois : le rythme jour/nuit s’installe

En l’espace de trois mois, le sommeil du bébé se transforme très rapidement. C’est à ce moment que toutes les composantes du sommeil adulte se mettent en place : apparition de la périodicité jour/nuit, des rythmes circadiens, de la température, des rythmes cardio-respiratoires et des sécrétions hormonales.

Les périodes de sommeil nocturne s’allongent. Si un nouveau-né peut dormir 6 heures d’affilée, un bébé de 3 à 6 mois peut aller jusqu’à 9 heures consécutives de sommeil. L’installation du rythme jour/nuit se met en place généralement avant 6 mois, mais dépend essentiellement des rythmes extérieurs (prises alimentaires régulières, moment de jeux, promenades, heures du coucher…). Cela varie donc d’un enfant à l’autre. Dans le même temps, le sommeil se modifie en qualité. Les périodes de sommeil agité disparaissent au profit d’un sommeil plus stable et plus profond.

De 6 mois à 4 ans : un sommeil comme les grands

L’enfant de 6 mois à 4 ans va réduire progressivement son temps de sommeil diurne. Il passe de 3 à 4 siestes journalières vers 6 mois, à 2 vers 12 mois, puis une seule vers 18 mois. La quantité globale de sommeil diminue lentement entre 6 mois et 4 ans pour atteindre 12 heures entre 3 et 5 ans. Dès lors, la structure du sommeil nocturne ressemble beaucoup à celle de l’adulte.

De 4 à 12 ans, l’enfant dépense beaucoup d’énergie dans la journée et s’endort rapidement le soir. La durée globale de sommeil devient progressivement inférieure à 12 heures.

Quand les troubles surviennent : réorganisez ! Lorsque des difficultés du sommeil apparaissent chez l’enfant, il faut être très attentif à la répartition du sommeil de jour, notamment au nombre et à la durée des siestes. Il sera alors peut être nécessaire de réorganiser le sommeil de façon à ce qu’il se rapproche de ce qui correspond à l’âge de l’enfant.

Doctissimo Stéphanie Lavaud

5 conseils pour lui donner des repères

Interdits : faites appel à votre bon sens
Ce que vous êtes en droit d'interdire, c’est ce que tous les parents interdisent ! C’est simplement une question de bon sens. Par exemple, il est légitime d’imposer à votre enfant de porter un imperméable lorsqu’il pleut dehors. En revanche, vous ne pouvez pas l’obliger à mettre un imperméable vert pomme simplement parce que vous aimez cette couleur. Et si vous avez peur de tomber dans l'autoritarisme, n'hésitez pas à dialoguer avec votre conjoint. Cela vous permettra de tempérer vos principes, de trouver un juste milieu.

Il n'y a pas d'âge pour poser des limites
Vous devez imposer des repères très tôt car la construction du psychisme se joue dès le plus jeune âge. D'après Claude Halmos, psychanalyste, vous pouvez dire au bébé qui pleure la nuit parce qu’il est loin de sa mère que ses parents sont un couple, qu’ils ont besoin de dormir et qu’il ne peut pas avoir sa maman pour lui tout seul. Le bébé le comprend très bien. De même, à partir de 2 ou 3 ans, un enfant est en mesure d’intégrer ce principe : "Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse". Et même à l’adolescence, il n'est pas trop tard pour donner des règles. L’ado a besoin de garde-fou car il ne mesure pas les dangers, mais aussi parce qu’il se construit dans l'opposition. Cadrez-le tout en permettant l’essor de sa personnalité, là est la difficulté.

Des règles universelles
Pour lui faire accepter les interdits, expliquez à votre enfant que ce sont les lois du monde et que vous ne les avez pas inventées. Il est important de lui expliquer le sens de ces règles, à quoi elles servent, car il doit comprendre qu’une loi peut aussi le protéger. Dites lui que les choses qu’il ne peut pas faire à la maison (comme frapper son petit frère) sont également punies par la loi à l’extérieur. Bien sûr, une fois que vous lui avez expliqué une fois ou deux, ne passez pas votre vie à vous justifier, optez pour le "c'est comme ça et pas autrement". Les réponses fermes et catégoriques sont utiles de temps à autre, elles rassurent l'enfant sur la capacité de ses parents à le protéger.

La punition, un passage obligé
Souvent difficile à appliquer, la punition est pourtant indispensable. Imaginez que lorsque vous brûlez un feu rouge, le gendarme se contente de vous dire "ce n’est pas bien". Vous recommenceriez ! La sanction est donc nécessaire, les mots n’ont de sens que s’ils sont validés par des actes. Cela fait prendre conscience à votre enfant que ce qu'il a fait est grave. Pour la forme de la punition, chaque parent est libre de faire comme il le sent : envoyer l'enfant dans sa chambre, le priver de dessert...

Stop à la culpabilité !
Non, vous n'êtes pas une mauvaise mère parce que vous ne répondez pas au moindre de ses désirs. Fixer des règles, ce n'est pas brimer et réprimer son enfant, c'est lui apporter protection et sécurité, c'est le préparer à vivre dans la société. A partir du moment où vous aurez compris que l’imposition de limites est vitale pour la construction de l’enfant, vous ne culpabiliserez plus. Car vous êtes dans la légitimité. Punir le petit dernier parce qu'il fait bêtise sur bêtise n'est pas un abus d'autorité. Répétez-vous que vous agissez pour son bien.

L'internaute mag

Françoise Dolto, le médecin qui parlait aux bébés, aurait 100 ans

A une époque où les filles convenables ne faisaient pas d'études, la petite Françoise voulait être "médecin d'éducation". Devenue pédiatre et psychanalyste, Françoise Dolto n'aura de cesse de donner corps à ce rêve d'enfant, y gagnant une notoriété toujours vivace.

Françoise Dolto "a apporté une autre approche de l'éducation des enfants", indique la psychologue de la petite enfance Sylviane Giampino, à l'occasion du centième anniversaire de sa naissance, le 6 novembre 1908. "Elle avait une espèce de sagesse philosophique qui permettait de dire haut et fort des choses que des gens malheureusement n'entendent pas aujourd'hui", ajoute Pierre Delion, chef de service de pédopsychiatrie au CHU de Lille, pour qui son enseignement conserve "une acuité formidable" face aux problèmes actuels.
"Dolto a placé la parole au centre de tout, rappelle Mme Giampino. Elle disait que l'enfant est dès sa conception un sujet humain de relation et de langage, mais qu'il doit recevoir une parole et des soins qui l'humanisent". A une époque -l'immédiat après-guerre- où le nourrisson était apparenté à un tube digestif, Françoise Dolto osait parler au foetus dans le ventre de sa mère.Sans savoir exactement comment, elle était persuadée que le bébé pouvait comprendre. "J'étais un peu zinzin", confessera-t-elle.

"Il y a des affirmations issues de l'observation clinique de Dolto qui semblaient de l'ordre de la pensée magique à l'époque, qui ont été démontrées par la recherche", indique Mme Giampino. Françoise Dolto "a eu envie de dire comment ça se passe quand quelque chose ne va pas. De façon à ce que les parents, les éducateurs, les soignants puissent faire au mieux pour que ça se passe bien pour les enfants"."C'est pour ça qu'elle a écrit +La cause des enfants+, qu'elle a créé la Maison Verte, c'est aussi pour ça probablement qu'elle s'est engagée dans un discours public". "Françoise Dolto à la radio, c'était une sorte de confiance en l'éducation populaire", estime la psychanalyste.

Avec le risque d'être mal comprise. A ses détracteurs qui lui reprochent aujourd'hui d'avoir fabriqué "des enfants rois", la psychologue répond que "si on lit +L'Image inconsciente du corps+, on comprend que c'est l'inverse". "C'est le livre dont on parle le moins et c'est vraiment là qu'elle a fait un apport théorique".
Au centre de sa théorie, la "castration symboligène" : elle va permettre à l'enfant en développement, qui découvre les potentialités de son corps, d'intérioriser un certain nombre de "règles du jeu" de la vie en société. "Les adultes sont là pour lui imposer des limites, simplement ça doit lui être expliqué, mis en mots", explique Mme Giampino.
"Dolto était tout sauf permissive. C'est un malentendu".Pour la psychologue, deux choses peuvent expliquer les reproches qui lui sont faits : d'une part "elle avançait sur un terrain de mentalités qui n'était pas encore prêt"; d'autre part certains saisissent l'occasion de son centenaire "pour ressortir la hache de guerre contre la psychanalyse".
"On peut dire que depuis Françoise Dolto et quelques autres, on s'occupe autrement des enfants dans la vie quotidienne", conclut Sylviane Giampino."Mais ce n'est pas parce que c'est son centenaire qu'il faut lui attribuer tous les apports de la psychologie du nourrisson et de l'évolution des pratiques professionnelles par rapport aux enfants", tempère-t-elle, citant Jenny Aubry, amie de Françoise Dolto, Juliette Favez-Boutonnier ou encore Geneviève Appell.

PARIS (AFP) -

Le rôle des parents après la séparation. Approche coopérative destinée aux parents en instance de séparation

Dans la plupart des cas, après un divorce ou une séparation, les parents continuent à jouer un rôle important dans la vie de leurs enfants. Les enfants ont besoin de se sentir aimés aussi bien par leur père que par leur mère, même si ceux-ci ne peuvent plus vivre heureux ensemble.

Le rôle des parents n'est pas facile. Tous les parents font des erreurs. Si vos enfants s'entendent bien avec vous et qu'ils se sentent aimés et acceptés, ils peuvent mieux tolérer vos imperfections.

Nous espérons que les renseignements inclus dans cette brochure vous permettront d'aider vos enfants à vivre votre divorce ou votre séparation avec moins de peine.

Une attitude positive

Si vous et votre partenaire vous êtes récemment séparés, vous vous sentirez parfois déprimé, seul, triste, coupable, et vous perdrez parfois confiance en vous. Vous pouvez avoir bien des sujets d'inquiétude, notamment en ce qui concerne votre argent, votre vie sociale, votre emploi, vos besoins personnels et ceux de vos enfants.

Si vous vous accrochez au passé et à l'amertume qui l'accompagne, il est certain que vous et vos enfants aurez des problèmes. Il est essentiel d'adopter une attitude plus positive, d'apprendre à mieux vous connaître, d'acquérir une plus grande confiance en vous et d'aspirer à des buts qui vous satisfont et vous paraissent importants.

Directives à l'intention des parents

La façon dont vous faites face à votre séparation ou à votre divorce influence la façon dont vos enfants y font face. Des conflits constants entre vous et votre partenaire, après la séparation, vous empêcheront de jouer correctement votre rôle de père ou de mère. Essayez de tirer profit de cette expérience; ne la considérez pas comme un échec, mais plutôt comme une période de croissance et de changement. De cette façon, vous serez à l'écoute de vous-même tout en restant à l'écoute de vos enfants. Voici quelques points qui pourraient vous être utiles :

1. Vous devez comprendre que la séparation et le divorce sont des expériences affectives difficiles, et que le temps est un facteur important dans le processus de guérison pour toutes les personnes concernées.
2. Les enfants ont besoin qu'on leur dise ce qui se passe dans la famille. Il se peut qu'au premier abord, ils ne montrent pas à quel point ils sont perturbés, ou encore qu'ils ne comprennent pas tout ce qu'implique pour eux la nouvelle situation. Lorsque vous expliquerez celle-ci à vos enfants, soyez simple et direct. Employez des mots appropriés à leur âge afin de les aider à comprendre et à commencer à accepter.
3. Les enfants, surtout les petits, pensent souvent avoir fait quelque chose de mal et peuvent croient que leur famille a des problèmes parce qu'ils n'ont pas été sages. Ils ont besoin de savoir qu'ils ne sont pas responsables de la séparation de leurs parents et que ni leur père ni leur mère ne les rejette ou ne les abandonne.
4. Il est très important que les enfants respectent autant leur père que leur mère. Il vous est peut-être difficile de ne pas critiquer l'autre parent, mais cela est absolument nécessaire au bon développement de vos enfants.
5. Les enfants ont besoin de leurs deux parents. Ne les forcez pas à prendre parti. Cela ne fera que susciter chez eux des sentiments de frustration, de culpabilité et d'amertume.
6. N'oubliez pas que le passé est important pour les enfants. Laissez-les parler des bons souvenirs qu'ils ont du temps où tous les membres de la famille vivaient ensemble.
7. Le divorce et la séparation entraînent habituellement des contraintes financières pour les deux parents. Il vaut mieux, sans blâmer l'autre, dire la vérité aux enfants sur la nouvelle situation financière et leur demander de participer à la réduction des dépenses.
8. Malgré la séparation, les enfants ont besoin que leurs parents continuent à exercer tous deux leur autorité parentale de façon cohérente. La culpabilité que les parents ressentent à la dissolution de leur union peut parfois influencer la façon dont ils disciplinent leurs enfants. L'âge de vos enfants et leur stade de développement, par exemple, influeront sur la manière dont vous ferez respecter la ligne de conduite que vous leur avez fixée, ainsi que sur les décisions concernant la garde partagée. Vos enfants ont besoin de savoir - et veulent savoir - ce que vous attendez d'eux; ils se sentent plus en sécurité lorsque vous leur imposez des limites qu'ils sont capables de comprendre. Vous les perturbez lorsque vous leur permettez de se comporter d'une manière qu'ils pensent ou qu'ils savent être incorrecte. Vous devez être prêt à leur dire « non ».
9. Il se peut également que les parents croient susciter une certaine confusion chez leurs enfants en imposant des règles de conduite différentes dans chaque foyer. En réalité, de manière générale, les enfants acceptent cet état de fait du moment qu'ils comprennent les règles et que celles-ci sont imposées de façon constante.

Le temps passé avec l'autre parent


Le comportement des parents influence beaucoup la façon dont les enfants s'adapteront sur le plan émotionnel après l'éclatement de la famille. Les circonstances détermineront l'emploi du temps et les plans qui seront les plus appropriés pour votre famille. Par exemple, vous tiendrez certainement compte du nombre et de l'âge de vos enfants quand vous prendrez une décision au sujet des nuits qu'ils passeront chez votre partenaire. Bien entendu, chaque famille est différente et ce qui convient à l'une peut ne pas convenir à une autre. Toutefois, certaines lignes directrices ont été établies pour quelques problèmes courants, notamment :

1. Il est important pour un enfant de communiquer régulièrement avec chacun des parents. Garder un certain contact permet à l'enfant de mieux faire face à la situation, de ne pas avoir autant le sentiment d'être rejeté et de moins redouter de ne plus jamais revoir son père ou sa mère (et ses grands-parents, tantes, oncles, cousins et cousines).
2. Parfois, les parents qui n'ont pas la garde quotidienne des enfants se demandent pourquoi ils devraient continuer à les voir. Il y a plusieurs raisons à cela. D'abord, les enfants s'inquiètent de savoir si l'autre parent mange bien et s'il a un endroit où dormir.
3. Le temps passé avec les enfants devrait être aussi agréable que possible pour tout le monde. Il est très important que les parents évitent de se disputer en présence des enfants.
4. Le parent qui vit avec les enfants doit les préparer physiquement et émotionnellement à apprécier le temps qu'ils passeront avec l'autre parent. Il peut vous être difficile de les aider à se préparer et de leur souhaiter de bien s'amuser si vous êtes en conflit avec votre ex-partenaire, mais vous leur permettez ainsi de bien s'adapter.
5. Souvent, celui qui n'a pas la garde quotidienne des enfants ne sait pas trop comment passer avec eux un temps si précieux. En organisant des sorties avec vos enfants, vous pouvez rendre leurs visites plus distrayantes, mais ce qui est plus important, c'est de vous consacrer à eux et de continuer à prendre part à leur vie. Renseignez-vous sur ce que les enfants aiment faire à divers âges. Certains livres, cours et organismes peuvent vous aider. Pour plus d'information à ce sujet, appelez au numéro de téléphone indiqué au dos de cette brochure.
6. On se demande souvent si le père ou la mère doit amener ses enfants chez son nouvel ami ou sa nouvelle amie. Après une période d'adaptation, vous voudrez tous deux partager d'autres aspects importants de votre vie avec vos enfants. De même, il se peut que ceux-ci veuillent inviter leurs amis pendant la période de garde qui vous est impartie. Toutefois, soyez prudents. Ces visites ne doivent pas remplacer le temps que vous passez avec eux. Vos enfants ne devraient pas à avoir à rivaliser avec quelqu'un d'autre pour obtenir votre attention, ni avoir l'impression qu'une autre personne occupe une plus grande place dans votre vie.
7. Les enfants doivent passer autant de temps que possible avec leurs parents. L'emploi du temps doit toutefois être flexible. Si les plans concernant une visite doivent être modifiés, la moindre des choses est d'en avertir votre partenaire aussitôt et de donner des explications complètes à l'enfant sur la situation.
8. Si la flexibilité est nécessaire, la fiabilité ne l'est pas moins. Vos enfants ont besoin de savoir qu'ils peuvent compter sur vous si vous leur dites que vous serez là. Il est important que votre relation avec vos enfants ait un aspect prévisible.
9. Ne vous servez pas de vos enfants pour vous renseigner sur l'autre parent ou pour vous disputer par personnes interposées. Ils seront mal à l'aise et craindront, s'ils disent ou font quelque chose pour vous plaire, de faire du tort à votre partenaire.
10. Il est possible que les enfants aient de nombreuses questions à poser après avoir passé du temps avec l'un des parents. Les parents doivent s'efforcer de se mettre d'accord sur la façon de répondre à ces questions.

Si vous avez besoin d'aide

Nous avons tous besoin d'aide à certaines étapes de notre vie. Lorsqu'on se trouve dans cette situation, cela ne veut pas dire que l'on est incapable de résoudre ses problèmes.

Nous nous tournons tous à un moment donné vers des amis ou des membres de notre famille. Après une séparation, il n'est pas rare de se sentir découragé et d'attacher trop d'importance aux sentiments négatifs et aux événements sombres de sa vie. Un conseiller professionnel est objectif et peut vous aider à comprendre vos réactions et celles de vos enfants, et vous encourager à vous servir de vos points forts pour composer avec les problèmes que vous rencontrez.



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Divorce: les enfants parlent aux parents.


Anne Laure Gannac, vous êtes journaliste au magazine Psychologies, et Yolande Gannac-Mayanobe, vous êtes psychologue clinicienne. Avec "Divorce, les enfants parlent aux parents", qui sort le 22 février 2008, vous tentez de proposer un accompagnement aux personnes qui doivent affronter le cap de la séparation. Vos motivations étaient forcément différentes. Quelles étaient-elles ?

Anne Laure Gannac : Nous pensons - souvent à juste titre - que les enfants n'ont pas à donner leur avis sur ce qui est d'abord une histoire d'amour entre adultes qui se termine. Mais c'est oublier qu'ils sont directement touchés par les effets familiaux de cette crise de couple. En leur proposant de confier leur expérience, l'objectif était de donner un autre point de vue du divorce. Il ne s'agit en aucun cas de culpabiliser les parents -ils y arrivent seuls!- mais plutôt de leur faire entendre une parole qui peut les aider à comprendre ce qui se passe dans la tête de leur enfant qui, souvent, n'ose pas leur expliquer directement ce qu'il ressent.

Yolande Gannac-Mayanobe : Sans commentaires, les témoignages n'avaient qu'une valeur informative ; l'abord psychologique a pour but d'aller au-delà d'un simple état des lieux. La diversité des cas retenus a permis d'aborder des situations très différentes. En tant que psychologue, j'ai trouvé intéressant et judicieux de décrypter des cas concrets, de donner des pistes de réflexion et des conseils aux personnes confrontées à la séparation. Cette fonction d'accompagnement est l'essentiel de la tâche du psychologue.

Vous a-t-il été facile de trouver les témoignages d'enfants de parents séparés et d'obtenir l'accord des parents ?
A.L.G : Trouver des enfants concernés est évidemment très simple. Il suffit de regarder autour de soi. Pour les plus jeunes, convaincre les parents n'a pas non plus été très compliqué. Au contraire, la plupart était enthousiaste à l'idée que leur enfant puisse enfin! avoir l'occasion de parler sur ce sujet qu'ils avaient très peu -voire pas- abordé ensemble. Beaucoup pensaient que cela pourrait faire du bien à leur enfant d'en parler à un tiers. C'est convaincre les enfants qui a été plus difficile, tout simplement parce qu'ils ont peur de blesser leurs parents ou de semer un peu plus la pagaille dans leur famille déjà divisée.

Vous a-t-il semblé que c'était douloureux d'en parler pour eux ou que c'était " libérateur " ?
A.L.G : Quand la souffrance apparaît, c'est plutôt en filigrane, dans les mots, les expressions. Beaucoup s'en défendaient : " ça ne me fait rien d'en parler "... Mais de manière générale, oui, il m'a semblé que ces confidences étaient libératrices. Certains me l'ont clairement dit, les adultes surtout, qui n'avaient pas eu l'occasion d'aborder ce sujet en profondeur depuis des années, voire jamais. J'ai entendu plusieurs fois : " je ne pensais pas que ça me ferait autant de bien d'en parler ".

Chaque divorce ou séparation est différents : finalement, il n'y a pas de " règles " pour les appréhender ?
Y.G-M : Même si chaque divorce ou séparation reste singulier, on peut tirer quelques " règles " communes pour les appréhender ; en premier lieu, rassurer les enfants en insistant bien sur le fait qu'ils ne sont absolument pas responsables du divorce et que les parents restent des parents responsables même s'ils sont séparés ; ne pas évoquer devant eux les problèmes intimes du couple, notamment sur le plan sexuel...

L'intérêt de l'enfant est ce qui doit prévaloir, notamment lorsque le juge tranche. N'avez-vous pas le sentiment que les enfants se retrouvent trop souvent pris en otage entre les parents ?
Y.G-M : Il arrive que l'enfant soit une sorte de monnaie d'échange entre les parents ; en fait, il est utilisé pour faire souffrir l'autre parent ; cette situation n'est pas rare et même lorsqu'elle n'est pas aussi dramatique, l'enfant a toujours plus ou moins le sentiment d'être une balle de ping- pong entre ses deux parents.

A travers les témoignages de votre livre, je remarque qu'ils en ont conscience, parfois peut-être plus que les parents eux-mêmes. Est-ce cela qui marque le plus ?
Y.G-M : L'enfant se retrouve au cœur du divorce ; il comprend qu'il va devoir" jongler " entre son père et sa mère ; même très jeune, il apprend à dire ce qu'il faut pour ne pas générer de disputes, ou au contraire pour retirer des avantages de la situation. D'otage, il peut devenir manipulateur.

A la lecture des vécus de certains, il apparaît que la famille recomposée soulève encore d'autres problèmes, notamment en matière d'autorité. Avez-vous des conseils à donner pour que cette " recomposition " fonctionne pour tous ?
Y.G-M : Dans la famille recomposée, les problèmes d'autorité sont plus aigus encore notamment au moment de l'adolescence. Pour que cela fonctionne, il est absolument nécessaire de poser clairement qui a autorité sur qui et dans quel domaine ; par exemple, qui décide si le jeune peut sortir en boîte ; est-ce seulement le parent chez qui il vit ? Est-ce son beau-père ? Ces questions doivent être abordées dans le calme entre adultes ; les règles concernant l'autorité doivent être stables et cohérentes, et non soumises à discussion à la moindre occasion.

Parler aux enfants, leur demander leur avis sur certains points : jusqu'où doit-on les intégrer et les intéresser à la séparation ?
Y.G-M : Les enfants donnent leur avis sur les projets qui les concernent eux exclusivement. En fonction de leur âge, ils pourront par exemple demander à vivre chez l'un ou l'autre parent. Il n'est pas souhaitable de les intéresser à la séparation, et de leur donner trop d'explications et de justifications que de toute façon, ils n'entendront pas.

L'un des témoignages " montre qu'un couple peut fonctionner sur le mode parental même s'il échoue sur le plan amoureux ". Pourquoi n'est-ce pas plus fréquent, entre gens adultes ?
Y.G-M : Si les deux parents sont tous deux disposés à se séparer, s'il n'y a aucune rancœur entre les deux, il est assez facile de fonctionner sereinement sur le mode parental. Mais quand l'un des deux est encore amoureux ou a des griefs contre l'autre, il lui est difficile voire impossible de se montrer complaisant vis-à-vis de l'autre. C'est très compliqué de surmonter les sentiments et de fonctionner de manière objective et raisonnable. Voilà pourquoi le fonctionnement idéal du couple parental qui n'est plus amoureux n'est pas si fréquent et il faut souvent du temps pour en arriver là.

Bien qu'une famille avec enfant sur 5 soit aujourd'hui monoparentale, comment expliquez vous que " le divorce reste une anormalité " dans notre société et aux yeux des enfants concernés ?
Y.G-M : Le divorce s'est banalisé mais l'idéal de la famille unie reste le but, l'objectif de tous les enfants, même quand ils deviennent adultes à leur tour. La famille représente la sécurité, le cocon au sein duquel l'enfant a une relation triangulée avec son père et sa mère ; il se sent au cœur de cet ensemble. C'est normal qu'il veuille en même temps son papa et sa maman. Donc la séparation est vécue comme " anormale ".

Vous semble-t-il que la transformation de la famille qui se dessine, avec l'accroissement des familles monoparentales, préoccupe réellement les acteurs politiques au sens noble, ou intéresse les médias ?
Y.G-M : Les politiques n'apportent que des réponses financières aux questions soulevées par le divorce. Il existe des aides matérielles pour les parents isolés. Mais sur le plan psychologique aucun soutien réel n'est mis en place ; sur le plan de l'organisation de l'habitat par exemple, il y aurait beaucoup à faire pour faciliter la vie des familles éclatées. Et il y a aussi un réel besoin de faire évoluer la loi sur le nom de famille pour que les enfants se situent facilement au sein de leur propre famille. Il y a urgence à modifier des lois inadaptées au nouveau mode de vie. Les médias qui s'empareront des vrais problèmes liés à la transformation de la famille ouvriront la voie à des réformes qui s'imposent. Actuellement, les médias se contentent de constater les faits.