Mon
enfant a-t-il besoin d'un psy ?
Gérard
Poussin
Emmener
son enfant consulter un psychologue est loin d’être une
évidence pour de nombreux parents. Pourquoi et qui
consulter ? Quand et comment le faire ? Comment cela
va-t-il se passer ?... autant de questions – et bien
d’autres – abordées par Gérard
Poussin, Professeur de psychologie clinique à l’université
Grenoble 2 dans Mon
enfant a-t-il besoin d’un psy ?
(InterEditions, 2005). Un ouvrage qui présente aussi les
spécificités d’une profession souvent mal connue
du grand public.
Existe-t-il encore beaucoup de prévention chez les parents
à emmener leur enfant consulter un « psy » ?
Il arrive encore fréquemment qu’un parent me dise qu’il
vient seul avec l’enfant parce que son conjoint estime que la
rencontre avec un psychologue est une chose parfaitement inutile.
Mon livre s’adresse plutôt à ceux qui hésitent,
qui ont eu des expériences décevantes ou qui ne savent
pas si la démarche pourrait vraiment concerner leur enfant.
Il y a des préventions qui sont justifiées – craindre,
par exemple, que la jeunesse de la discipline que nous exerçons
ne conduise certains d’entre nous à remplacer une
partie de leur ignorance par de fausses connaissances. En sciences,
plus les recherches avancent, plus les écoles théoriques
contradictoires se réduisent. Mais en psychologie, il en va
différemment. Les mécanismes de notre cerveau sont
encore mystérieux et il est parfois difficile de comprendre
certains phénomènes. Moins l’on est certain du
savoir dont on dispose, plus on a tendance à s’accrocher
aux théories qui prennent l’allure de dogmes. On
comprend dans ces conditions qu’une partie du public y perde
son latin et rejette tout en bloque, comme Molière avait
rejeté la médecine du XVIIe siècle
en observant les querelles des « Diafoirus »
de son époque. Il fallait donc donner aux parents une petite
boussole pour se guider dans le maquis des écoles et voir sur
quoi ils pouvaient se reposer avec confiance, tout en acceptant que
nos connaissances en matière de psychologie soient encore
limitées : c’est l’objet de ce livre.
Quelles sont les situations où la consultation d’un
psychologue pour enfant se révèle utile – voire
indispensable ?
C’est précisément l’objet de mon livre de
déterminer dans quel cas et à partir de quels indices
il est indispensable de consulter un psychologue. Les situations
sont extrêmement variées et je ne peux évidemment
toutes les résumer ici, mais j’ai tenté de les
décrire de la manière la plus exhaustive possible.
N'existe-t-il pas à l'inverse une « pression
sociale » qui conduirait les parents à s'inquiéter
de façon parfois excessive pour leurs enfants ?
La crainte que l’enfant « ne réussisse pas
dans la vie » est telle que les parents se sentent
coupables de ne pas avoir fait « ce qu’il
fallait ». De plus, les théories à la mode
ne manquent pas de renforcer ce sentiment de culpabilité.
J’espère donc que les parents qui s’inquiètent
outre mesure rencontreront des collègues qui seront capables
de resituer leur responsabilité de manière équilibrée.
En général, les parents qui sont effectivement nocifs
pour leurs enfants ne consultent pas le psychologue, car ils sont
persuadés d’être parfaits. Il y a donc peu de
chance que nous soyons obligés de pointer une
irresponsabilité parentale. Je n’ai pas d’inquiétude
à ce niveau : ce n’est pas la consultation chez le
psychologue qui accentuera une « pression sociale »
excessive.
Comment se repérer dans les différentes démarches
d’aide psychologique existantes pour les enfants ?
C’est une question abordée en détail dans
l’ouvrage. Pour choisir le professionnel le mieux adapté
pour l’enfant, il faut d’abord se poser la question du
problème de cet enfant. Ainsi, tout n’est pas abordable
par la psychothérapie par exemple, et il y a aussi des cas
qui ne nécessitent pas l’intervention d’un
psychothérapeute. Un travail préalable est donc
nécessaire avant de s’engager dans cette démarche.
A partir de quel âge un enfant peut-il aller consulter ?
Il
n’y a pas d’âge pour consulter, et en même
temps l’âge de l’enfant va jouer un rôle
important dans la décision de consulter. Le livre s’attache
notamment à déterminer les besoins de consultation en
fonction de l’âge de l’enfant. Par exemple, un
enfant qui fait pipi au lit à trois ans n’est pas
encore à considérer comme énurétique,
alors que cela sera incontestablement le cas s’il a six ans ou
plus. Mais ce n’est qu’un exemple parmi d’autres...
Comment faire si l’enfant refuse d'aller voir le
psychologue ?
Il faut commencer par aller voir soi-même le psychologue et
lui expliquer la situation. Celui-ci peut soit permettre au parent
de préparer l’enfant à venir le voir, soit
l’aider à comprendre les problèmes de son
enfant, même si ce dernier persiste à refuser la
consultation.
Quels sont les différents publics visés par votre
livre ?
Au-delà des parents, ce livre s’adresse à tous
ceux qui peuvent rencontrer des enfants en difficulté et qui
se posent la question d’une consultation psychologique. C’est
le cas au premier chef des personnels de l’Education nationale
avec lesquels j’ai coutume d’échanger
personnellement sur ces questions. Les professeurs des écoles
notamment se posent beaucoup de questions sur leur intervention et
sur leur rôle de conseil auprès des parents. La plupart
refusent de se transformer en psychologues, tout en ayant
suffisamment de connaissances dans le domaine pour percevoir les
difficultés d’un enfant avec une certaine clairvoyance.
Ils regrettent même parfois de ne pas pouvoir échanger
sur ce point avec les praticiens de la psychologie de l’enfant
qu’ils peuvent côtoyer par leur profession. J’ai
donc cherché à leur donner quelques pistes. En dehors
du cadre professionnel, chacun peut également se trouver
confronté à un enfant qui ne va pas bien, dans sa
famille où chez des amis. Ces situations sont également
prises en compte dans l’ouvrage.
©
DUNOD EDITEUR, 14 Février 2005
Centre Repères
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