mardi 4 mars 2008

Questions sur la sexualité des enfants.doc

La sexualité infantile

Si la sexualité de l'adolescent est un sujet souvent abordé par les parents ou les éducateurs, leurs connaissances sur la sexualité infantile sont souvent plus floues. Certes, les théories de Freud, qui font une large place à la sexualité infantile, se sont couramment répandues grâce aux médias, à la presse ou aux ouvrages destinés au grand public. Mais, les parents, les éducateurs, ont bien souvent dans leur esprit, l'image d'un enfant idéal qui se présenterait sans sexualité. Comme si parler de sexualité infantile pouvait porter atteinte au mythe de l'innocence enfantine chantée par les poètes. Cette page a pour but d'apporter quelques éclaircissements sur ce sujet et de faire réfléchir tous ceux qui préfèrent avoir quelques idées sur la sexualité de leur progéniture plutôt que de n'en rien savoir ou de s'interroger sur le sexe des anges.
Tout d'abord, une mise au point s'avère indispensable. La sexualité infantile n'est pas de même nature que la sexualité de l'adolescent ou que celle de l'adulte. Elle s'oppose à la sexualité génitale qui, elle, se développe lorsque les organes génitaux sont arrivés à maturité et que peut s'exercer la fonction reproductrice.
C'est pour cela que toute relation a caractère sexuel entre un enfant et un adulte est traumatisante pour un enfant et peut occasionner de graves désordres psychiques. Si l'adulte abuseur est une personne ayant autorité sur l'enfant, cela ajoute encore à la gravité du dommage, car tous les repères de sécurité psychique, de confiance en l'adulte, qui sont les fondements de l'éducation, s'en trouvent bouleversés.
Rappelons les principaux stades du développement de la libido chez l'enfant selon Freud.
Pour Freud, la personnalité d'un individu s'appuie sur un soubassement essentiel qui s'organise dès la naissance autour de pulsions sexuelles qu'il désigne aussi par le terme "libido".
A chaque âge de la vie correspond une organisation dominante, ainsi Freud a établi une chronologie des stades de la libido, reprise ensuite par d'autres auteurs, mais il faut bien préciser que ces stades se chevauchent et coexistent tout au long du développement, les grandes organisations prégénitales de l'enfance laissant ensuite la place à la sexualité adulte.

Le stade oral (de la naissance à deux ans)
Le plaisir de sucer, d'abord lié au besoin physiologique de se nourrir, devient le lieu d'une activité autoérotique qui constitue le premier mode de satisfaction sexuelle. Au plaisir de sucer, s'ajoutent au moment de l'apparition des dents, des fantasmes de morsure et de dévoration. Le stade oral est lié à la relation entre l'enfant et le sein maternel, à la fois bon et mauvais, source de satisfaction et de frustration. L'émergence d'une sexualité implique donc dès le départ, non seulement une fonction vitale mais aussi une relation à autrui. Il y a d'emblée une dimension objectale (l'objet, c'est le sein maternel) et hétéro-érotique (amour tourné vers l'autre) de la libido.
C'est donc la bouche qui est, pendant cette période, le lieu principal et la source privilégiée du plaisir, d'où le nom de stade oral pour qualifier ce stade. Cette transformation de la bouche en zone érogène nous fournit un premier exemple du mécanisme fondamental de l'étayage. C'est en effet dans la mesure où la bouche accomplit une fonction nutritive primordiale pour la survie, qu'elle est le siège de stimulation qui vont aboutir à l'éveil d'un plaisir sexuel, lequel sera recherché ensuite pour lui-même.

Le stade anal (entre deux et quatre ans)
Ce stade se caractérise par une organisation de la libido placée sous le primat de la zone érogène anale. La relation d'objet est liée à la fonction de défécation sur les modes alternés de l'expulsion et de la rétention. Les fèces prennent alors une valeur symbolique (cadeau offert ou refusé à la mère). On voit s'affirmer le sadomasochisme en relation avec le développement de la maîtrise musculaire.
A ce stade aussi, la relation privilégiée à autrui intervient dans la centration de l'intérêt de l'entourage familial sur l'éducation à la propreté. L'enfant obtient, en utilisant la fonction naturelle de l'excrétion, des marques d'amour ou de réprobation de ses proches. L'intérêt porté à ce besoin physiologique, peut le mettre dans une position de toute-puissance, qu'il n'abandonnera pas toujours facilement.

Le stade phallique (entre quatre et six ans), l'Oedipe et la castration
La zone érogène se déplace dans ce stade vers la zone génitale. C'est une sorte de préfiguration de la sexualité définitive de l'adulte.
Au point de vue de la relation d'objet, le stade phallique se caractérise par la place qu'y prend le complexe d'Oedipe.
L'enfant va éprouver à l'égard de ses parents, alternativement, des désirs amoureux et hostiles. L'enfant découvre la différence des sexes et des sentiments ambivalents d'amour et de jalousie vont naître à l'égard de ses parents.
Le petit garçon va redouter la menace paternelle en réponse à ses fantasmes sexuels, il en résulte une angoisse de castration tandis que la petite fille ressent, selon Freud, l'absence de pénis comme un préjudice qu'elle cherche à nier, compenser ou réparer. Le désir d'avoir un enfant s'affirme chez la petite fille sous une forme fantasmée.
Mais l'interdit de l'inceste, commun à toutes les civilisations, va agir au plan symbolique. en tout état de causes, le petit garçon et la petite fille vont renoncer à séduire le parent du sexe opposé pour mieux s'identifier au parent du même sexe.

La période de latence (six à douze ans)
Pendant cette période, un long intermède s'instaure entre la culminance de l'Oedipe et la puberté. Il ne s'agit pas d'une disparition de la libido mais d'une mise en veilleuse et d'un rejet dans l'inconscient sous l'effet du refoulement. L'activité sexuelle n'est pas interrompue pour autant, elle fournit une réserve d'énergie qui est, détournée vers des buts autres que sexuels. Elle contribue à la formation des sentiments sociaux, au développement de mouvements de sublimations qui vont soutenir considérablement tous les efforts déployés pour acquérir les savoirs scolaires et culturels. Durant cette période de latence, on assiste aussi à une systématisation du Surmoi, c'est-à-dire à une intériorisation de tous les interdits sociaux qui sont le fondement de notre morale, et de toute civilisation.
Voilà tracées à grands traits, les théories relatives à la sexualité infantile qui sont le plus couramment admises, à l'heure actuelle, par les psychanalystes.

Mais qu'en est-il des croyances de l'enfant, pendant cette période, au sujet de la sexualité des adultes ?

Les théories sexuelles infantiles sur la sexualité adulte
Les enfants développent une curiosité précoce, un désir de savoir, qui les pousse à s'interroger sur deux questions essentielles :
-la différence des sexes
-l'origine des enfants.
Freud, dans ce domaine aussi a été le premier à réfléchir sur les représentations des enfants, relatives à la sexualité. Il a constaté que les enfants construisent des théories particulières autour de ces questions dont il est bien difficile de les détourner.
Les jeunes enfants négligent la différence des sexes. Les garçons ont tendance à attribuer à tous les être humains un pénis. Cette croyance va de pair avec l'angoisse de castration lorsque le petit garçon est confronté , par l'observation des petites filles de son entourage, à la réalité.
La deuxième théorie concerne la naissance. L'ignorance du vagin (ou sa confusion avec le rectum), conduit l'enfant à se représenter le nouveau-né "évacué comme un excrément". Cette théorie cloacale de la naissance (calquée sur le modèle de la digestion des aliments) apporte aussi une solution quant à la question de la fécondation ; en effet, dans cette logique, l'origine des enfants peut être attribuée au fait d'ingérer quelque chose par la bouche.
En ce qui concerne la naissance, on peut rencontrer des explications, quand les jeunes enfants s'expriment à ce sujet, selon lesquelles les bébés naîtraient par le nombril ou par une ouverture pratiquée au niveau du ventre, explications qui restent proches de la théorie cloacale.
Quoiqu'il en soit, Freud explique que si les jeunes enfants croient que les bébés sont mis au monde par l'anus, l'homme peut aussi bien enfanter que la femme ; le petit garçon peut donc également forger le fantasme qu'il peut aussi faire des enfants.
La troisième des théories sexuelles infantiles décrites par Freud concerne une conception sadique du coït, le rapport sexuel est conçu, chez le jeune enfant, comme une action violente, comme une lutte, une agression du père contre la mère. L'enfant se forgerait cette représentations à partir de perceptions accidentelles, incomplètes qu'il aurait des rapports sexuels entre les parents, en référence aux expériences de lutte qu'il connaît dans les rapports avec d'autres enfants ; expériences d'où n'est pas absent un supplément d'excitation sexuelle.
Enfin Freud souligne la résistance des jeunes enfants à l'information sexuelle : en dépit des explications fournies par l'adulte, les enfants restent fixés aux propres théories qu'ils se sont forgés ; cette résistance étant à mettre au compte du refoulement.
Comme tout savoir, la construction du savoir sur la sexualité, l'origine des enfants, questions essentielles à notre condition humaine, se fait progressivement chez le jeune enfant.
Les éducateurs, les parents, soucieux de répondre aux demandes des enfants ou de les anticiper, doivent donc savoir rester modestes dans leurs objectifs.
Pour les aider, il existe de nombreux ouvrages à destination du jeune public, que l'enfant pourra découvrir sous le regard vigilant et bienveillant de l'adulte.
En tout état de causes, on peut penser que la qualité de la relation qui s'établit à ce moment-là, facilitera le dialogue ultérieur entre les parents et l'adolescent, lorsque ce dernier s'engagera dans sa vie sexuelle adulte.

CLERGET S. Nos enfants aussi ont un sexe, Paris, Robert Laffont, 2002
FREUD S. Trois essais sur la théorie de la sexualité, Paris, Gallimard, 1987.
FREUD S La vie sexuelle, P.U.F., 1992
GABEL M. Les enfants victimes d'abus sexuels, P.U.F.1992
RUFO M. Tout ce que vous ne devriez jamais savoir sur la sexualité de vos enfants, Anne Carrière, 2003.
RAPOPORT Danielle, La sexualité "oubliée" des enfants.

http://pagesperso-orange.fr/genevieve.cavaye/sexualite.htm

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